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Internationale Fraendag

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JIF 2018: Revendications

Prévenir et éliminer – la précarité des femmes au Luxembourg

La plateforme d’action Journée internationale des femmes (JIF) met le focus sur la précarité féminine. La plateforme a élaboré un document qui reprend quelques domaines clefs en la matière.

A partir d’aujourd’hui et jusqu’au 8 mars, nous présenterons chaque jour un aspect voire une revendication en détail en rapport avec la précarité féminine et nous vous donnons rendez-vous le 8 mars entre 12 et 14 heures à la place d’Armes pour la grande mobilisation publique de cette année, les chantiers de l’égalité, pour apporter votre coup de pelle quant à nombreux chantiers en matière d’égalité entre les sexes qui restent encore à travailler !

 « La précarité est l’absence d’une ou plusieurs des sécurités permettant aux personnes et aux familles d’assumer leurs responsabilités élémentaires et de jouir de leurs droits fondamentaux. L’insécurité qui en résulte peut être plus ou moins étendue et avoir des conséquences plus ou moins graves et définitives. Elle conduit le plus souvent à la grande pauvreté quand elle affecte plusieurs domaines de l’existence qu’elle tend à se prolonger dans le temps et devient persistante, qu’elle compromet gravement les chances de reconquérir ses droits et de ré-assumer ses responsabilités par soi-même dans un avenir prévisible. »[1]

J.WRESINSKI. Grande pauvreté et précarité économique et sociale. Paris, Journal Officiel, 1987, p 14.

Notre document se base sur l’étude de publications sur le sujet tout comme sur des consultations ciblées d’acteur-e-s sur le terrain.

Consciente de la dimension multifactorielle de la précarité au féminin, nous ne prétendons pas recouvrir l’intégralité des facteurs à prendre en compte. Le document se concentre sur une série d’éléments identifiés comme étant de grande importance, à savoir, le marché du travail, les pensions de vieillesses, le revenu minimum garanti, les familles monoparentales, les ressortissantes de pays tiers, la santé et le logement.

Marché du travail

L’autonomisation des femmes est une condition essentielle à la réalisation de l’égalité entre femmes et hommes.Les femmes au Luxembourg ont-elles le même degré d’autonomie que les hommes ? Qui dit autonomie pense bien entendu à la capacité de tout-e un-e chacun-e de subvenir à ses propres besoins, donc à l’autonomie financière.

Le plan d’égalité des femmes et des hommes 2015-2018 du gouvernement mentionne l’égalité dans l’emploi parmi ses 6 priorités. Les mesures évoquées concernent exclusivement le programme des actions positives, donc une mesure de sensibilisation.

Le taux d’emploi est un des indicateurs souvent évoqués pour mesurer la participation des femmes et des hommes au marché du travail. [2]

Selon les statistiques de l’Organisation de Coopération et de développement Economiques (OCDE), au quatrième quarta de 2015[3], au Luxembourg, le taux d’emploi masculin se situait à 71,3% alors que le taux d’emploi féminin était à 60,8%, soit une différence d’environ 10 points. Si on considère ce taux en équivalent temps plein (ETP), la différence augmente fortement. En effet, nous notons alors un taux d’emploi masculin de 71,8% et un taux d’emploi féminin de 51,4%. Bien entendu, ces chiffres s’expliquent par le temps partiel, lequel se conjugue encore toujours au féminin. En effet, alors que la part des hommes actifs qui travaillent à temps partiel en 2015 était de 5,2%, celle des femmes actives se situait à 26,7%. Plus d’un quart des femmes salariées ont donc des emplois à temps partiel.

Selon le rapport « Quality of work, Luxembourg, 2017[4], presque 33% des femmes occupées à temps partiel travaillent entre 16 et 20 heures par semaine. La raison principale du travail à temps partiel pour les femmes est liée à leurs responsabilités personnelles et familiales (enfants, personnes âgées, …) : cela concerne 58% des femmes travaillant à temps partiel (contre 22% des hommes). La part des emplois à temps partiel est plus importante dans les professions peu qualifiées (58% des femmes travaillant dans les emplois non qualifiés travaillent à temps partiel, selon l’enquête sur les forces de travail 2015, contre 22% pour les professions intellectuelles et scientifiques).

Or, qui dit temps partiel, dit salaire partiel et pensions de retraite partielles !

S’il est vrai que les femmes ont investi le marché du travail, il est tout aussi vrai que les hommes n’ont pas fait de même par rapport à la sphère privée qui reste de l’apanage des femmes. Selon l’enquête sur l’emploi du temps (Statec), Les femmes consacrent environ 4h (3h53), soit deux fois plus que les hommes aux tâches ménagères et au soin des enfants. Après la naissance de leur premier enfant, 46% des femmes éligibles prennent le congé parental; contre 11%[5] des hommes éligibles (source: Valentova et Bia, 2013, LISER, Rapport pour le Ministère de la Famille).

Les conséquences de ces différences sont notamment la persistance d’une différence de salaire brut horaire et la ségrégation tant horizontale que verticale de notre marché du travail. En effet, en 2015, l’écart salarial entre femmes et hommes atteignait 5.5% au Luxembourg (Cet écart est calculé comme la différence entre le taux horaire brut des hommes et des femmes, en % du taux horaire brut des hommes, Eurostat).

Enfin, pour ce qui est du volet consacré au marché du travail, la plate-forme tient à évoquer le travail non déclaré. La nature de ce travail fait que nous ne disposons pas de statistiques précises sur ce phénomène. Personne ne peut toutefois nier son existence. Il est bien connu qu’un certain nombre de femmes effectuent des travaux « au noir » chez les particuliers.

Depuis quelques temps, un phénomène s’installe peu à peu au Luxembourg. Il s’agit de l’emploi de personnes munies d’un visa touristique et qui sont « engagées » sans être déclarées pour garder des personnes dépendantes.

Ces deux formes de travail clandestin touchent particulièrement les femmes qui se retrouvent sans couverture individuelle de la sécurité sociale et, bien souvent, avec des revenus inférieurs au salaire social minimum (SSM).

Selon diverses études, les personnes LGBT, tout en se voyant confrontées aux mêmes risques socio-économiques que les autres personnes, ont à faire face à des obstacles spécifiques en raison de leur orientation sexuelle/identité de genre. Elles sont, par conséquent, plus à risque à subir la précarité dès leur plus jeune âge.[6]

La plate-forme revendique :

  • l’individualisation de la fiscalité ;
  • l’information de fond sur et le contrôle de l’application des mesures retenues dans le Code du travail sur l’emploi de personnes enceintes, accouchées et allaitantes ;
  • la ratification et la mise en œuvre de la convention Organisation Internationale du Travail 156[7] sur les travailleurs ayant des responsabilités familiales ;
  • l’établissement obligatoire de plans d’égalité dans le secteur public ainsi que l’inscription obligatoire d’un plan d’égalité entre femmes et hommes dans toute convention collective – ces plans doivent comprendre une analyse du régime de rémunération et des actions de suivi ;
  • l’instauration de comptes épargne-temps.
  • le développement conséquent de structures d’accueil diversifiées et dotées de personnel qualifié et pour les enfants et les personnes dépendantes, condition sine qua non de la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles pour femmes et hommes ;
  • l’amélioration des formations spécifiques à l’attention des délégué-e-s à l’égalité et l’introduction de formations sur l’égalité entre hommes et femmes à l’attention de toutes les délégations du personnel dans les programmes de l’Ecole Supérieure du Travail ;
  • la mise en place d’une campagne d’information et de sensibilisation sur le travail clandestin et les réseaux de traite des êtres humains s’adressant aussi bien aux potentiel-le-s employeurs/employeuses et au grand public ;
  • une étude d’envergure, ventilée par niveau de qualification, et prenant en compte les discriminations multiples, dont notamment celles en raison de l’orientation sexuelle et l’identité de genre, pour évaluer si le % élevé des femmes en travail à temps partiel est dû à un choix ou si c’est une exigence du marché du travail ;
  • campagnes régulières pour inciter les hommes au congé parental et à un partage équilibré des soins et tâches ménagères ;
  • un contrôle poussé visant à identifier et à sanctionner les « agences » par lesquelles les services de personnes sont proposés aux particuliers pour des travaux d’aide et de soin à domicile.

[1] J.WRESINSKI. Grande pauvreté et précarité économique et sociale. Paris, Journal Officiel, 1987, p 14.

[2] La plate-forme se base sur les statistiques de l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) lesquelles sont systématiquement ventilées par sexe et renseignent sur un plus grand nombre d’indicateurs qui nous paraissent importants. Les derniers chiffres disponibles sont de l’année 2015, http://stats.oecd.org/index.aspx?queryid=54749

[3] Pour les 15-64 ans

[4] https://www.csl.lu/fr/publications-newsletters/publications

[5] En 2014, 20% des congés parentaux ont été pris par des hommes, source Doc parlementaire No 6935

[6] Voir notamment : https://williamsinstitute.law.ucla.edu/williams-in-the-news/beyond-stereotypes-poverty-in-the-lgbt-community/

[7] http://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f?p=NORMLEXPUB:12100:0::NO::P12100_INSTRUMENT_ID:312301

Pensions de vieillesse

Pour ce qui est des pensions de vieillesse, pour 2015, à 44% des pensions de vieillesse non-migratoires féminines vient s’ajouter un complément pour pension minimale (4,5% chez les hommes)[1]. Rappelons qu’en 2015, la loi prévoyait une pension mensuelle minimale de 1 726,135 EUR, due dans le cas d’un stage d’au moins 40 ans en périodes effectives ou complémentaires.

Les femmes ont non seulement des pensions de vieillesse inférieures à celle des hommes, mais elles en bénéficient aussi plus tard que ceux-ci. Selon le rapport annuel 2016 de l’Inspection Générale de la Sécurité sociale : « Durant 2015, 10 752 pensions nouvelles ont été attribuées à 5 612 hommes et 5 140 femmes. Les pensions de vieillesse représentent 59,0%, les pensions d’invalidité 18,1%. L’analyse par âge d’entrée en pension de vieillesse fait apparaître que 75% des hommes concernés ont droit à une pension de vieillesse anticipée, contre 61% seulement chez les femmes. A contrario, les hommes sont proportionnellement moins nombreux que les femmes à ouvrir le droit de pension de vieillesse à l’âge légal de 65 ans ; 24% contre 40%. Cette situation s’explique notamment par les interruptions de carrière, plus fréquentes chez les femmes, qui limitent la possibilité de retraites anticipées. »

La plate-forme considère que cette situation ne peut perdurer. Elle revendique :

  • le partage obligatoire des droits à pension en cas de divorce (pour les mariages actuels)

Cette mesure est à concevoir comme une mesure transitoire qui permettra de pallier aux défauts du système actuel qui entraîne des effets négatifs dans le seul chef des femmes qui ont soit réduit, soit interrompu leurs carrières professionnelles pour éduquer leur(s) enfant(s) alors que leurs conjoints ont non seulement eu la possibilité de faire évoluer leur carrière professionnelle, mais aussi de se constituer une carrière de droits à pension complète.

  • le partage obligatoire des droits à pension des époux (pour les mariages futurs)
  • l’individualisation des droits à pension

L’individualisation des droits à pension signifie qu’en cas d’interruption de carrière professionnelle, la carrière de droits à pension soit continuée sous forme de cotisations obligatoires. La plate-forme est parfaitement consciente que cette revendication implique des coûts directs pour les individus. Elle est toutefois d’avis que ceux-ci se justifient par l’évitement de coûts dans le temps à seule charge des femmes. En effet, ce sont elles qui, comme nous l’avons vu, bénéficient de pensions personnelles réduites et qui, bien plus souvent que les hommes, sont obligées de prolonger leur carrière professionnelle afin de parfaire leurs périodes de stage.

[1] Source : Rapport de l’Inspection Générale de la Sécurité sociale 2016, http://www.statistiques.public.lu/fr/actualites/conditions-sociales/sante-secu/2017/01/20170113/20170113.pdf

Revenu Minimum Garanti (RMG)

En 2016, nous retrouvons 11 050 femmes et 9 619 hommes parmi les 20 669 bénéficiaires du RMG[1]. 74,7%[2] des ménages de femmes dispensées pour garde d’enfants sont des femmes vivant seules avec leurs enfants. Cette dispense est prévue expressément par l’article 14 de la loi actuellement en vigueur. Le projet de réforme en cours prévoit également une dispense, mais en d’autres termes : « la personne qui élève un enfant pour lequel elle touche des allocations familiales, lorsque des motifs sérieux par rapport à l’enfant s’opposent à l’accomplissement des mesures énumérées à l’article 17 »

La plate-forme constate qu’’il n’est donné aucune indication sur ce que seraient « des motifs sérieux », ni sur l’instance qui en décide. Elle constate également que la dispense ne concerne que les mesures d’activation.

La plate-forme revendique :

  • que la future indemnité « REVIS » reste garantie dans le cadre des mesures d’activation quand les femmes ne peuvent accepter un travail ou suivre une formation en raison de la garde d’un ou plusieurs enfants quand elles apportent la preuve que cette garde ne peut être assurée par des tiers.

[1] http://www.gouvernement.lu/6863015/2016-rapport-activite-snas.pdf

[2] 3 434 femmes avec enfants en âge scolaire et 149 femmes avec des enfants à élever/personnes à soigner figuraient parmi les 11 050 femmes dispensées en 2016.

Familles monoparentales

En 2015, le taux de risque de pauvreté se situait à 15,3% au Luxembourg.[1] Pour les familles monoparentales, ce risque s’élève à 44,6% ! La publication « Panorama social 2016 » retient : « Le Luxembourg affiche l’une des pires performances européennes en la matière. En effet, seules Malte et la Lituanie ont des risques de pauvreté (pour monoparentaux) plus élevés que le Grand-Duché ».

Il est absolument urgent de venir en aide aux familles monoparentales qui sont, rappelons-le, à forte majorité constituées de femmes avec enfants. En 2016, elles représentaient 82,7% des familles monoparentales.[2] Il y va d’une question d’égalité en termes de genre, mais également d’un enjeu sociétal majeur car ces enfants sont les adultes de demain.

La plate-forme revendique :

  • un allégement conséquent de la charge fiscale des familles monoparentales par le biais de l’octroi de la classe d’impôts 2 ;
  • l’instauration d’un système de garde pour enfants flexible et gratuit qui devra également pouvoir accueillir les enfants en cas de maladie du/de la parent-e ;
  • un soutien financier plus conséquent pour les sortir de la précarité ;
  • une implication/responsabilité financière des pères de ces enfants mieux définie ;
  • une meilleure collaboration entre les différents services et intervenant-e-s et une prise en compte des différentes facettes d’une situation.

[1] http://www.statistiques.public.lu/fr/actualites/conditions-sociales/conditions-vie/2016/03/20160325/CSLpanoramasocial2016.PDF

[2] http://www.statistiques.public.lu/catalogue-publications/regards/2016/PDF-03-2016.pdf

Familles monoparentales

En 2015, le taux de risque de pauvreté se situait à 15,3% au Luxembourg.[1] Pour les familles monoparentales, ce risque s’élève à 44,6% ! La publication « Panorama social 2016 » retient : « Le Luxembourg affiche l’une des pires performances européennes en la matière. En effet, seules Malte et la Lituanie ont des risques de pauvreté (pour monoparentaux) plus élevés que le Grand-Duché ».

Il est absolument urgent de venir en aide aux familles monoparentales qui sont, rappelons-le, à forte majorité constituées de femmes avec enfants. En 2016, elles représentaient 82,7% des familles monoparentales.[2] Il y va d’une question d’égalité en termes de genre, mais également d’un enjeu sociétal majeur car ces enfants sont les adultes de demain.

La plate-forme revendique :

  • un allégement conséquent de la charge fiscale des familles monoparentales par le biais de l’octroi de la classe d’impôts 2 ;
  • l’instauration d’un système de garde pour enfants flexible et gratuit qui devra également pouvoir accueillir les enfants en cas de maladie du/de la parent-e ;
  • un soutien financier plus conséquent pour les sortir de la précarité ;
  • une implication/responsabilité financière des pères de ces enfants mieux définie ;
  • une meilleure collaboration entre les différents services et intervenant-e-s et une prise en compte des différentes facettes d’une situation.

[1] http://www.statistiques.public.lu/fr/actualites/conditions-sociales/conditions-vie/2016/03/20160325/CSLpanoramasocial2016.PDF

[2] http://www.statistiques.public.lu/catalogue-publications/regards/2016/PDF-03-2016.pdf

Ressortissantes de pays tiers

Par ressortissantes de pays tiers la plate-forme entend les femmes immigrées, exilées et demandeuses de protection internationale.

Bien qu’il n’existe logiquement aucune statistique sur le sujet, il existe des cas où des femmes sont obligées par leur partenaire d’enchaîner des grossesses dans le but de les isoler de la population résidente et ainsi freiner leur éventuelle éducation et autonomisation. La violence domestique fait bien souvent, tout comme pour les résident-e-s, partie de la vie quotidienne de ces femmes qui, en raison de leur situation vulnérable, sont extrêmement désarmées pour faire face à ces violences. Les femmes réfugiées restées sans nouvelles de leurs conjoints en raison des conflits qu’elles ont fuis se trouvent dans l’impossibilité d’obtenir le divorce qui leur permettrait de « refaire librement » leur vie dans le pays d’accueil. Tout comme les hommes, les femmes ont un besoin en formation, ce aussi bien linguistique que professionnelle. Au contraire des hommes, la charge d’enfants et les convictions patriarcales les empêchent souvent de prendre part à des formations. Sans formations, elles ne pourront accéder au marché du travail et risqueront de rester dépendantes des services sociaux.

La plate-forme revendique :

  • l’information systématique des femmes sur leurs droits ;
  • l’ouverture systématique de dossiers individuels afin de ne pas lier le destin des femmes à celui de leurs époux ;
  • un dépistage systématique d’éventuelles violences domestiques et la prise en charge spécifique des victimes et des enfants ;
  • l’accès aux chèques services afin de permettre l’accès à la garde d’enfants afin de pouvoir suivre des formations.

Santé

Le Luxembourg a un système de sécurité sociale qui couvre une grande partie des personnes qui vivent sur son territoire. Toutefois, les personnes qui n’ont pas de titre de résidence n’ont pas de couverture sociale.

Témoignage recueillis par l’association « Médecins du Monde » :

Jusqu’en juillet 2017, Sophie[1] est venue souvent au Centre médical de Bonnevoie. Elle a 29 ans, est originaire d’un pays de l’UE et « vit dans la rue depuis longtemps, ici et là-bas, avec comme seul bien son caddy rempli d’histoire ». La solitude de Sophie a touché Isabelle, assistante sociale chez Médecins du Monde. Sophie est souvent revenue la voir pour être écoutée, mais pas seulement : « J’y vais assez souvent, ils m’aident pour mon estomac. Ils sont très réconfortants, ils donnent ce qu’on a besoin, c’est très gentil, ils ont mis fin à ma souffrance… » Aujourd’hui, Sophie ne vient plus. Elle a sûrement tenté sa chance ailleurs.

Sophie n’est pas seule à être dans une telle situation de précarité.

La plate-forme s’inquiète aussi particulièrement de la situation des femmes avec handicap pour lesquelles la précarité entraine de graves conséquences.

La plate-forme revendique :

  • la mise en place d’un système de protection sociale – qui prend aussi en compte la détresse psychique – incluant toutes les femmes vivant au Luxembourg, indépendamment de leur statut administratif ;
  • la généralisation du tiers-payant ;
  • l’accompagnement spécifique pour les femmes en situation de handicap.

La santé sexuelle, affective et reproductive concerne particulièrement les femmes. En situation de précarité et de privation matérielle, le choix de la contraception dépend forcément de son coût. Ainsi, la pose d’un stérilet, d’un patch ou d’un implant, pourtant des moyens de contraception fiables et de longue durée, pose particulièrement problème.

Dans le même contexte, il faut évoquer le prix à payer pour les serviettes hygiéniques, tampons et cups, articles de première nécessité pour toute femme qui toutefois ne sont pas taxés au taux de TVA réduit.

Enfin, la plate-forme s’inquiète du degré d’accès des femmes précaires aux mesures de dépistage et de soins des maladies sexuellement transmissible.

La plate-forme revendique :

  • l’accès gratuit à la contraception sans limite d’âge ;
  • l’application du taux réduit de la TVA aux produits tels que les serviettes, les tampons et les cups ;
  • la garantie d’accès à l’information, le dépistage et les soins axée spécifiquement sur les femmes en situation de précarité.

[1] Prénoms changés pour respecter l’anonymat des patientes

Logement

Il est impossible de traiter de la précarité sans aborder le problème général du logement au Luxembourg. Problème qui est d’une gravité toute particulière pour les personnes qui sont en situation de précarité.

Les facteurs qui amplifient la situation de précarité des femmes sont multiples. La plate-forme en a abordé plusieurs dans ce document. Pouvoir disposer d’un logement décent est de prime importance.

Jeudi, Chantal s’est présentée pour voir le médecin. Cette Luxembourgeoise de 54 ans, soignée, habillée simplement mais avec goût, habite « chez une copine ». Avant, elle travaillait. Avant, elle payait son loyer. Avant, elle avait une carte de sécurité sociale. Mais après une période de chômage, puis un temps de RMG… la voici dans l’impossibilité de payer son loyer. « J’ai été mise dehors par l’huissier. Et je suis en attente d’un logement depuis. On m’oblige à vivre au Foyer Ulysse pour avoir droit au RMG, mais je ne veux pas, je n’y arrive pas : un dortoir avec d’autres femmes ayant toutes sortes de problèmes… » Chantal a donc préféré rester chez son amie qui l’héberge temporairement.

Cette solution n’est pourtant pas la bonne puisque, depuis cette décision, Chantal ne reçoit plus le RMG. Refusé. Sans revenus, sans adresse et sans protection sociale, Chantal a pu se faire soigner chez Médecins du Monde. Elle y bénéficie aussi d’un soutien psychologique. »

En matière de logement, la plate-forme revendique :

  • la création et la mise à disposition de logements accessibles adaptés au nombre d’enfants pour familles monoparentales ;
  • la promotion de « logements de 2e phase » pour les victimes de violence domestique ;
  • l’augmentation de l’offre de transports publics en général et en particulier en milieu rural où le coût du logement est souvent moins élevé que dans les villes.